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LGBT+ au travail

Pourquoi est-il important que les employeurs abordent la question ?

Vie professionnelle et vie privée sont perméables

Une objection fréquente à aborder les questions LGBT+ au travail est d'affirmer que l'orientation affective et sexuelle, et l'identité de genre des employé∙e∙s relèvent de la sphère intime et qu'il serait malvenu pour l'employeur de s'en mêler. En effet, l'orientation affective et sexuelle d'une personne, de même que son identité de genre sont une affaire privée, et il ne s'agit certainement pas pour un employeur de s'y immiscer. Par contre, on ne peut occulter le fait que la vie privée, familiale et amoureuse infiltre constamment la place de travail. C’est le cas par exemple lorsque nous discutons entre collègues du dernier week-end et des activités effectuées avec notre conjoint∙e et/ou nos enfants. C’est le cas également lorsque nous affichons une photo de notre famille à notre place de travail, ou lors des soupers d’entreprise auxquels sont convié∙e∙s les conjoint∙e∙s ou encore lorsqu’il s’agit de faire valoir son droit à un congé parental, etc. Ces situations ordinaires de la vie professionnelle peuvent être sources de difficultés diverses pour les employé∙e∙s LGBT+, si le cadre réglementaire et le climat de travail de l’organisation sont hétéronormatifs et ne tiennent pas compte du vécu et des réalités des personnes LGBT+.

Exemple concret

"Isabelle est gardienne de la paix au sein d’un commissariat de police. Suite à la naissance des enfants portés par sa compagne avec qui elle est pacsée, elle demande un congé de naissance et un congé de « paternité » qui lui sont tous deux refusés. Par la suite, elle fait l’objet de propos homophobes et de comportements déplacés de la part de son supérieur hiérarchique" (tiré du Guide "Agir contre les discriminations liées à l'orientation sexuelle et à l'identité de genre dans l'emploi", Défenseur des droits de la République Française, p.23, 2017)

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Les discriminations envers les personnes LGBT+ au travail sont une réalité

Différentes études, menées en Suisse ou à l’étranger, mettent en évidence que les discriminations envers les personnes LGBT+ sur leur place de travail sont courantes (voir la page Ressources pour des liens vers ces études). Il existe différentes formes de discriminations homophobes et transphobes, allant de propos moqueurs ou dégradants jusqu'aux violences physiques ou sexuelles. Selon l'enquête suisse "Etre LGBT au travail" , les discriminations les plus souvent rencontrées sont les suivantes : propos et gestes obscènes, étiquetage en raison de l’expression de genre, outing, étiquetage en raison de l’orientation sexuelle, harcèlement sexuel, mise à l’écart d’événements sociaux informels, mise en doute des compétences professionnelles, mise à l’écart de l’équipe. Les personnes trans* sont encore plus touchées par ces types de discriminations que les personnes homosexuelles.

Ces discriminations mettent les organisations devant leur devoir de protéger la personnalité de leurs employé·e·s (art. 328 al. 1 CO). Elles affectent le bien-être, la santé psychique et parfois la santé physique des victimes, mais aussi des témoins, et par ricochet leur engagement pour l’organisation. Par crainte des discriminations, de nombreuses personnes LGBT+ ne sont pas visibles au travail, c'est à dire qu'elles cachent cette part de leur vie aux personnes qu'elles fréquentent au quotidien. En Suisse, moins de la moitié des personnes interrogées via l'enquête "Etre LGBT au travail" se disent totalement visibles au travail: 39% de femmes homosexuelles visibles contre 48% d'hommes homosexuels. En France, en 2019, cette proportion stagne à 50%, mais se monte à plus de 2/3 au sein des organisations signataires de la charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle. Ne pas être visible au travail implique la mise en place de stratégies, coûteuses en énergie, pour dissimuler son orientation sexuelle et/ou affective ou sa transidentité. Certaines personnes homosexuelles s'inventent un·e partenaire de l'autre sexe pour donner le change lors de discussions entre collègues par exemple. Cette énergie dépensée pour se préserver au travail est une énergie qui n'est pas disponible pour la réalisation des tâches professionnelles.

20%
de taux de chômage chez les personnes trans* en Suisse, soit près de cinq fois la moyenne de la population générale (Enquête Transgender Network Switzerland, 2014)
70%
des répondant∙e∙s homosexuel·le·s à l'enquête suisse "Etre LGBT au travail" ont été témoins de discriminations homophobes et/ou transphobes au cours des 3 années précédent l'étude.
9,5%
des entreprises belges qui disposent d'une politique de la diversité thématisent la question transgenre (Institut pour l'égalité des femmes et des hommes, Belgique, 2009)
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L’adoption et la mise en œuvre de politiques inclusives envers les personnes LGBT+ profite aux employé·e·s et à l’employeur

L’intérêt d’aborder les questions LGBT+ au travail poursuit à la fois une visée éthique et pratique. Ethique, parce que dans une société démocratique garantissant les mêmes droits à l’ensemble de la population, il importe d’offrir à toute personne, indépendamment de son orientation affective et sexuelle ou de son identité de genre, une place dans cette société et dans le monde du travail plus spécifiquement, respectueuse de ces différences. Les récents élargissements des missions de plusieurs Bureaux de l’égalité en Suisse romande, qui œuvrent désormais pour l’inclusion des personnes LGBT+, vont dans ce sens. Pratique, parce que les études se multiplient pour mettre en exergue le fait que les personnes LGBT+ qui se sentent reconnues et libres de s’exprimer, vont rester plus longtemps dans l’organisation et apporter davantage à leur employeur, tout en étant moins stressées. Les politiques de soutien aux personnes LGBT+ dans les organisations sont liées à un engagement au travail plus élevé, de meilleures relations entre collègues, une satisfaction au travail accrue. Ces politiques ont un effet positif sur la santé des employés LGBT+, de même que sur leur productivité, et entraînent une diminution des discriminations à leur égard (Badgett et al., 2013).

La difficulté de dénoncer les discriminations

« Les résultats de l’étude « Etre LGBT au travail » montrent que lorsque les employé·e·s qui ont été la cible de discriminations se sont tourné·e·s vers leur hiérarchie ou vers le service RH, ni l’une ni l’autre n’ont pris des mesures dans près de 90 % des cas. Ne prendre aucune mesure amène à une aggravation de la situation, à une perte de confiance de l’em­ployé·e qui en est la cible et donne à l’auteur·e un sentiment d’impunité puisque rien n’est fait. » (Guide Travailler la diversité, Fédération genevoise des associations LGBT, p.9)

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Les personnes hétérosexuel·le·s et cisgenres peuvent être victimes de discriminations homophobes et transphobes

Les discriminations LGBTphobes sur le lieu de travail ne touchent pas uniquement les personnes homosexuelles ou trans*. N’importe quelle personne dont l’attitude momentanée ou l’expression de genre ne sont pas conformes aux normes dictant ce qui est considéré comme féminin et masculin, peut être la cible de discriminations. En créant un climat inclusif et respectueux de chacun·e dans son organisation, l’employeur agit dans l’intérêt collectif, qui dépasse largement celui des personnes représentées par l'acronyme LGBT+.